Tribune libre
La reprise post-confinement : quels impacts psychologiques à l'horizon, Monsieur le Ministre?
L'annonce de la reprise cette semaine, parsemée d'ordres et de contre-ordres erreintants, n'aura pas manqué de susciter de multiples appréhensions chez le personnel enseignant.
En
un tournemain, il a fallu successivement s'improviser
peintres-décorateurs.trices pour tracer des sens de circulation, des
distances de sécurité, des instructions bien visibles, puis
champion.ne.s de la pédagogie, puisque de nombreux.ses enseignant.e.s
du primaire ont fait le choix, fort.e.s de leur engagement auprès de
leurs élèves, de continuer à assurer en même temps l'enseignement en
présentiel et en distanciel (même si vous, notre cher Ministre, nous
permettiez de n'en faire qu'un des deux).
Une prérentrée à 1 000 km/h qui laissait déjà un arrière-goût de précipitation mêlée d'angoisse...
Dès le départ donc, les enseignant.e.s se sont retrouvé.e.s dans le contexte inversement proportionnel à celui du confinement : il avait fallu du jour au lendemain devenir les rois et reines de l'innovation télépédagogique, maintenant il fallait fissa se débrouiller de nouveau seul.e.s pour que ça tourne !
Une
rentrée bien tendue et anxiogène pour bon nombre d'enseignant.e.s.
Entre les entrées, sorties, cantines, récréations échelonnées, il faut
se mettre des alarmes toute la journée pour être bien sûr.e.s de ne pas
se tromper d'une minute, au risque de croiser un autre groupe dans les
couloirs ! Une journée qui s'écoule au pas de charge, sans une seule
pose le matin ni l'après-midi dans les petites écoles au moins, puisque
chaque enseignant.e sort seul.e avec son groupe en récréation, où il /
elle passe son temps à rappeler aux enfants de "s'éloigner", de "tenir
les distances", de "ne pas toucher ceci ou cela", de "se laver les
mains"...
Les
demandes de remontées d'effectifs tous les matins, la soudaine
imposition du port du masque obligatoire pour les enseignant.e.s toute
la journée et non pas seulement dans les situations (portails,
récréations) annoncées aux parents, les injonctions distillées au
compte-gouttes pour l'éducation musicale, l'E.P.S., etc. rendent encore
plus harassante cette reprise. Alors, comment au bout du compte ne pas
céder à un sentiment de malaise, voire de déprime, dans de telles
conditions ?
Et les enfants, dans tout ça ? Si la reprise de l'école était préconisée par bon nombre de psychologues et pédopsychiatres, le retour dans ce contexte d'école déshumanisée, où tout ou presque devient interdit ou sous haute surveillance, où rien n'a été préparé sereinement, est-il vraiment la réponse la plus adaptée à la souffrance psychique des enfants ?
Dernière
bonne nouvelle : tout cela n'est bien entendu valable que jusqu'au 1er
juin, date à laquelle tout sera sans doute à refaire...dans le même
tohu-bohu.